dimanche 5 novembre 2017

Contes d'Halloween et de Samhain La nuit du casse-noisettes

  Autour du feu de camp qui brûle dans l'ancienne grange désaffectée, le groupe d'adolescents s'amuse à se raconter des histoires en cette nuit du casse-noisette ou de la pomme croquante. Conformément à la tradition, ils ont ramené des pommes, des noix et des noisettes à déguster au coin du feu en cette dernière nuit d'octobre. Les pommes finissent rapidement au bout d'un bâton à cuire à la flamme. Les premiers fruits à la peau craquante et dégoulinante d'un jus chaud qui coule sur les mentons juvéniles et poisse les doigts malhabiles qui se brûlent sur les fruits cuits qui finissent rapidement dans l'estomac des adolescents. Ils rient à l'évocation de leurs parents qui les croient tous chez l'un d'entre eux sous prétexte de préparer un exposé sur la chasse aux sorcières dans l'Europe médiévale. Mais les géniteurs sont bien vite oubliés grâce au concours bienvenu d'une bouteille de soda à la citrouille qui fait le tour du petit groupe.
  Repus, les jeunes garçons, enroulés dans de chaudes couvertures, commencent à se raconter des histoires pour se faire peur en croquant des noisettes. La nuit tombe et le vent commence à faire gémir le vieux bois centenaire tandis que la lune passe par les interstices entre les planches disjointes. Inquiets, les garçons sans oser se l'avouer, écoutent les bruits nocturnes, attentifs. Mais tout est silencieux et un éclat de rire déchire la nuit. Ils se raidissent mais peut-être n'est-ce que le feu qui crépite qui a voulu se jouer d'eux. Soulagés, ils remettent des pommes à dorer à la flamme.
- Qui commence ? demande un garçon aux longs cheveux roux qui tombent en rideau sur ses épaules. Qui a une histoire effrayante à nous raconter ? 
- Moi ! Vous savez qu'on dit qu'un trésor est enterré sous cette grange ?
Tous regardent le petit blond en polo rayé qui vient de prendre la parole.
- Par qui ?
- Par le vieux Tommy qui a emporté son trésor dans la tombe. On prétend qu'il s'est enrichi à force de privations et que pour empêcher que les impôts ne lui volent le fruit de son travail, il dormait littéralement sur un trésor : son matelas était un matelas de billets. Dans son testament, il a demandé à être enterré avec mais ses héritiers, intrigués, ont déchiré son coffre-fort de tissu et n'ont pas respecté ses dernières volontés. On prétend néanmoins qu'il reviendra un jour de l'au-delà pour se venger et que ce vieux filou a plus d'un tour dans son sac. Il aurait réussi à enterrer une partie de son trésor afin d'être sûr de le garder pour lui seul dans l'au-delà. On prétend qu'il estimait que ses fainéants d'héritiers qui l'ignoraient de son vivant ne méritaient pas son pactole.
  Une idée germe dans les jeunes esprits et quelques minutes plus tard, les jeunes gens commencent à creuser la terre froide à main nue. Peu à peu, un trou commence à grignoter la petite cabane branlante qui se remplit de terre, de terre, encore et encore. La terre envahit l'espace et l'odeur d'humus commence à donner la nausée aux membres du groupe. Le petit blond commence à avoir envie de vomir mais il parvient à se contenir.
- On a fini ? gémit-il, le cœur au bord des lèvres.
- Oui, je crois bien. répond le plus grand d'entre eux.
En effet, quelques minutes plus tard, il bute sur une surface dure qui rend un son creux. Les garçons  se penchent sur le trou et ils tentent de deviner sur quel objet ils viennent de tomber à la lumière blafarde de la lune qui vient de se dévoiler.
- Personne n'a pensé à prendre une lampe de poche, par hasard. 
Seul le silence lui répond. Il inspire avant de continuer son examen accroupi au bourd du trou.
- C'est du bois. On dirait une planche.
- Il y a une croix, c'est un cercueil. l'interromp le garçon aux cheveux roux.
- Que contient-il ? s'interroge le garçon blond en fracassant le bois d'un coup de pied.
Le bois pourri par l'âge et l'humidité craque sous le coup et l'adolescent manque de tomber dans le trou.
- Moi ! Malheur à vous qui m'avez libéré. Ainsi qu'à mes descendants qui ont bâti leur fortune sur la mienne, ma vengeance les frappera.
La forme noire se dresse devant eux, enroulée dans une cape noire. Apeurés, les adolescents sont tétanisés et incapables de bouger. Mais déjà, l'ombre est sur eux et les dévore. La légende disait vrai. Dans un rire qui emplit la nuit, l'ombre se met en quête de ses descendants pour assouvir sa vengeance longuement mûrie dans l'au-delà.