jeudi 10 août 2017

Maquis de l'âme


J'ai pris le maquis dès ma plus tendre enfance. Je suis sortie des sentiers battus ou tout tracés que l'on voulait que je suive. En toutes choses, j'ai suivi mes idées, mon instinct et me suis fait ma propre opinion.

Un peu artiste, un peu brouillon, un peu éclectique, je me suis adonnée à mes passions et j'ai suivi mes inclinations. Parfois les regards de mon entourage se faisaient sévères ou s'emplissaient d'incompréhension face à cette nature libre que rien ne pouvait corrompre.

Parfois un professeur un peu sévère se penchait sur mes cahiers dont les marges gribouillées trahissaient le tumulte de mon esprit qui explorait de nouveaux horizons lors de mornes journées de classe qui m'ennuyaient. Bon élève, je faisais bonne figure et masquait mon forfait sous des notes prises scrupuleusement.

Les adultes souvent me disaient que j'étais trop jeune pour comprendre, avoir une opinion ou argumenter dans des débats passionnés. Vexée, je me suis réfugiée dans les livres et les journaux intimes où durant des heures, à longueur de page, je refaisais le monde, le critiquais et rêvais d' un monde meilleur.

Je portais mes idées comme un étendard. Héritière des libres-penseurs, affranchie de préjugés et d'idées toutes faites, j'avançais à la recherche d'âmes qui répondent à la mienne, prêtes à refaire le monde pour un avenir meilleur ou a minima, prêtes à débattre des travers de ce monde et de la manière de le rendre meilleur à la mesure de nos possibilités.

L'adolescence a voulu sonner le glas de mon libre-arbitre et de ma liberté de pensée. Jamais encore, on n'avait tant voulu me fondre dans la masse et me faire entrer dans le moule. Mais mon âme sauvage et altière s'y refusait et le clamait haut et fort. L'incompréhension et la solitude furent le prix à payer en cette période troublée où les âmes et les idées se forgent. Mais restée fidèle à moi-même, je suis restée ce que je suis sans me soucier des murmures sur mon passage et des moqueries, incitations à me fondre dans la masse. Si j'accorde le droit à chacun le droit d'avoir son opinion propre, de quel droit, chacun se permet-il de la railler sans même discuter de mes idées, de mes idéaux et de mes valeurs ?

J'ai pris le parti de rester moi-même envers et contre tout sans nuire à qui que ce soit mais en enrichissant la vie de celui qui daigne m'ouvrir son cœur. Je refuse la standardisation des idées et les modes qui ne durent qu'une saison. Mon âme est en constant mouvement, en évolution, elle croît chaque jour au contact d'idées et d'influences nouvelles que j'intègre, confronte ou rejette sans cesse. Je ne me soucie pas des modes ou de la bienséance. Je trie, je recoupe, je compare, j'enrichis les informations et les opinions qui viennent à moi sans me soucier de l'avis de mon interlocuteur.

J'ai trop souvent observé par le passé, ces personnes qui changent d'opinion au gré de leur interlocuteur. Parfois lors d'une même conversation, ils changent de chemin pour complaire à leur partenaire de bavardage et non par l'aboutissement d'une longue et minutieuse réflexion sur la question du moment.

Je me gausse de ce qui se fait et ne se fait pas, tant que mes valeurs ne sont pas affectées et que je suis prête à en supporter les conséquences. J'écoute mon instinct, mon cœur, les murmures du vent dans la lande et les cris de l'océan, libres et sauvages confidents.

J'absorbe les informations de multiples horizons pour mieux les confronter à mes savoirs et mes idées, pour mieux les faire grandir et les faire évoluer sans me soucier des regards posés sur moi quand je pars dans des débats enflammés.

Mon credo s'appelle « Liberté » et ma bible s'appelle « Encyclopédie universelle ». Mes héros sont ceux qui se sont opposés à leur temps, incompris et honnis de leurs pairs. Ils ont pour nom Galilée, Christophe Colomb ou encore Voltaire.

Mon cœur a pris le maquis et ne s'en est jamais remis. J’ai pris le maquis, le maquis de l’âme.